Trois cardinaux électeurs ne pourraient pas participer à l’élection du nouveau pape prévue le 7 mai prochain, alors que des tractations se multiplient au sein de l’Église et de la diplomatie.
Les cardinaux continuent d’arriver à Rome pour participer aux congrégations cardinalices. En principe le Collège cardinalice compte 252 cardinaux, dont 135 cardinaux électeurs et 117 cardinaux non-votants. Selon le droit canonique, tous ceux qui n’ont pas encore atteint la limite de 80 ans, sont appelés à participer à l’élection pour le choix du successeur de François.
Sauf que ces dernières heures, une tempête secoue le collège électoral.
Des médias italiens ont annoncé des désistements au sein du collège électoral de plusieurs cardinaux. Deux des cardinaux, dont Vinko Puljić cardinal croate de Bosnie-Herzégovine et Antonio Cañizares Llovera, l’archevêque émérite de Valencia ont préalablement été déclarés empêchés en raison de leur santé défaillante ou insuffisante pour faire le voyage. D’autres médias ont annoncé que le prélat croate aurait finalement obtenu le feu vert de son médecin et se rendra bien à Rome.
Un troisième prélat non partant à cette élection, le cardinal italien Giovanni Angelo Becciu, ancien préfet de la Congrégation pour les causes des saints.
Si les raisons officielles de ces défections ne font l’ombre d’aucun doute, au sein du clergé, on pense que ces multiples désistements ne sont pas anodins. Ils seraient liés, selon certains à la « guerre » pré-électorale qui se livre au sein de la curie romaine et de la diplomatie entre les conservateurs et les modérés.
Les profil des cardinaux « déserteurs », en disent long.
Cardinal Cañizares Llovera
Surnommé “le petit Ratzinger”, ce prélat conservateur, intellectuel et cultivé est d’une grande orthodoxie conservatrice en théologie morale. Radicalement opposé à l’idéologie LGBTQ+, il s’est montré très critique de ce qu’il a appelé « les idéologies attaquant la famille chrétienne », comme « l’idéologie du genre ». Il n’a pas hésité à prendre position dans le débat public en Espagne, ce qui lui a valu plusieurs plaintes des associations de défense des LGBT.
Cardinal Vinko Puljić
Créé cardinal par Jean-Paul II, il est membre de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples et du Conseil pontifical pour le dialogue inter-religieux, au sein de la Curie Romaine. L’ancien président de la Conférence épiscopale de Bosnie-Herzégovine est actuellement le cardinal électeur appelé à assumer la fonction de protoprêtre en cas de conclave, ce dernier a pour mission de prononcer la prière formelle lors de l’inauguration d’un nouveau pape, après que le protodiacre ait remis le pallium et avant que le doyen du Collège ne présente l’Anneau du pêcheur.
Ancien préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, le deuxième cardinal bosniaque de l’histoire est un conservateur qui ne cache pas ses positions sur les questions telles que l’ordination des femmes et l’abolition du célibat clérical. Selon lui, « une Église qui a résisté au défi du communisme n’a pas d’idées aussi exotiques. En effet, de telles attitudes offensent et étonnent nos fidèles. Nous ne pouvons comprendre une Église où le sacrifice est un mot étranger et où il existe un Jésus sans croix ». Le prélat de 75 ans reste néanmoins ouvert au débat. « On peut discuter de n’importe quel sujet, mais en s’appuyant sur l’Évangile et non sur la laïcité et le relativisme. L’arbitraire religieux s’est installé dans la vie de l’Église, mais nous devons revenir à l’Évangile originel », pense-t-il.
Cardinal Giovanni Angelo Becciu
A côté de ces deux conservateurs, le cardinal italien Becciu de tendance modéré ne participera pas au conclave. Sous pression, il a finalement renoncé à faire le déplacement pour le conclave. Dans un communiqué publié ce mardi, il a annoncé « avoir décidé d’obéir à la volonté du Pape François, tout en restant convaincu de mon innocence ». Une décision pour « le bien de l’Église » et « pour contribuer à la communion et à la sérénité du conclave », écrit-il.
Ancien préfet de la Congrégation pour les causes des saints, le cardinal italien a été contraint de démissionner en 2020, avant d’être condamné un an plus tard pour détournement de fonds, abus de pouvoir et subornation. L’ancien Nonce apostolique avait alors été condamné à cinq ans et six mois d’emprisonnement, à une interdiction définitive d’exercer une fonction publique et à une amende de 8 000 €. Jusqu’à présent celui qui fut substitut aux affaires générales à la Secrétairerie d’État du Vatican continue de clamer son innocence.
Essama Aloubou