Le couple Bongo et leur fils sont arrivés dans la nuit de jeudi à vendredi en Angola, selon un communiqué de la présidence angolaise. Une fois à Luanda, leur exil attise les passions au sein de l’opinion gabonaise. Dans un communiqué, les avocats français de la famille Bongo, François Zimeray, Catalina de la Sota et Pierre-Olivier Sur, ont déclaré: « Cette libération est le fruit de longs efforts tant sur le plan judiciaire que diplomatique. Après vingt mois d’une séquestration aussi arbitraire que cruelle accompagnée de tortures, la famille est enfin réunie autour de l’ancien président Ali Bongo ».
Le principal rival du général Oligui, Alain-Claude Bilie By Nze, dernier Premier ministre sous M. Bongo, a jugé que la libération de la famille démontre que sa détention « ne respectait pas le cadre de la loi et de la justice ». « Le président Oligui Nguema n’a pas fait preuve de clémence: il a dû s’incliner face aux exigences internationales après ce que tout le monde a compris comme un abus de pouvoir », a-t-il déclaré.
Le politologue Victor Mouang Mbading est agacé : «est ce que [la famille Bongo] va revenir au Gabon pour être jugée ? C’est un point d’interrogation. Quoi qu’il en soit, ce geste là révèle une chose : que le « coup de libération » a aussi libéré les PDGistes qui ont pillé le Gabon comme Ali Bongo, sa femme et son fils », lance-t-il.
Les familles des victimes de la crise post-électorale de 2016 sont dans tous leurs états : « Vous pensez un peu à comment nous, on se sent ? » , lance de son côté la présidente de l’association Réconciliation, Aïcha Tsoumbou, dans une vidéo qu’elle a publiée sur les réseaux sociaux.« La cinquième République est-t-elle là pour favoriser les personnes qui nous ont massacrés ? Pour favoriser l’injustice ? […] Monsieur le président, ça ne fait même pas un mois que vous avez pris le pouvoir, et vous avez déjà pris une telle décision. Qu’allons-nous penser de vous ? Avons-nous bien fait de vous élire ? », poursuit-elle dans ce même extrait.
Selon le député du parlement gabonais de transition, Geoffroy Foumboula Libeka, le transfert de la famille, « au milieu de la nuit et dans un silence total », de « véritable honte pour les premiers jours » du nouveau gouvernement. « Où est la souveraineté du Gabon? », s’est-il interrogé sur les réseaux sociaux, accusant la libération de la famille Bongo d’être « le prix à payer » pour la réintégration du Gabon au sein de l’Union africaine (UA), actuellement présidée par Joao Lourenço.
Georges Mpaga, le président du réseau des ONG gabonaises qui luttent en faveur de la bonne gouvernance, déclare malgré tout comprendre les raisons qui ont poussé à la libération de l’ancien président et de sa famille. «Je pense que ce sont des raisons d’État, des raisons humanitaires qui ont prévalu dans cette décision visant à l’exfiltration, donc à la libération, d’Ali Bongo », affirme celui-ci.
Ali Bongo, dont la famille a dirigé pendant 55 ans le Gabon, avait été renversé le 30 août 2023 par le général Brice Clotaire Oligui Nguema et était depuis assigné à résidence dans la capitale Libreville.
Cette libération fait suite à des contacts entre le président angolais Joao Lourenço et Brice Oligui Nguema, élu président du Gabon en avril avec près de 95% des voix.
Essama Aloubou