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Sénégal: où est passé la culture à Dakar?

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Cinéma, théâtre, librairies et livres tous ces beaux espaces qui font la réputation d’une cité ont disparu de Dakar au fil des ans. Dans la capitale comme ailleurs au Sénégal, le rêve ne semble plus être à la mode. Et au même moment où, ce qui reste du village artisanal, se meurt du coté de Soumbedioune, l’homme ou la femme de culture s’interroge sur le devenir de la cité. Belle et très attachante hier, le Dakar d’aujourd’hui n’offre plus une véritable scène à qui veut faire de la production ; et cela, en dépit de l’ouverture d’un Grand Théâtre, il y a quelques années. Où est donc passée la culture dans cette ville si riche de ses artistes et de ses arts ? Paradoxe, c’est au moment où Alain Gomis remporte le dernier Grand Prix du Jury du Fespaco pour son film « Félicité », que l’on souvient tout d’un coup que la grande urbanisation a oublié le cinéma dans ses projets. Dans le paysage urbain sénégalais des années 2000, (coté cours comme sur les façades des rues), les belles affiches de cinéma qui fascinaient jadis les enfants et les moins jeunes habitués à des salles comme Plazza, Roxy, Vog, Abc, ou Le Paris, n’existent plus. Alors, dans ce dossier qui clôture notre rubrique « Grand format sur les beaux arts », il s’agit d’un véritable Sos, qui est lancé pour sauver ce qui reste des espaces culturels à Dakar.

Dakar, ville de culture, il faudra repasser. Le rêve ne semble plus d’actualité à l’heure d’internet et de facebook. Et pourtant, quand on raconte aux plus jeunes, on pourrait leur faire savoir qu’avant le « Mémorial Gorée Almadies », Dakar, c’était aussi « Le Club des Antillais », « Les Nouvelles Editions Africaines », Gorée et tout ce qui s’ensuit, mais encore ses lycées de renom (Van vo, Blaise Diagne, Maurice Delafosse…) Ou encore, L’Ifan et sa grande université avec des professeurs de notoriété qui ne parlaient que culture et sociétés, je veux nommer, Georges Ballandier (1) et Pierre Fougeyrollas (2). Espaces de rencontres et de partages, la ville de culture qui n’avait rien à envier aux grandes cités du monde, c’était aussi à l’image d’artistes comme Iba Ndiaye (3), le sculpteur Ousmane Sow, mais encore des écrivains et cinéastes comme Ousmane Sembène, Tidiane Aw, Momar Thiam, Paulin Soumanou Vieyra etc.

Les arts dans la cité, voilà qui devrait fasciner le regretté Joe Ouakam qui vient de disparaître. Même le combat de cet homme aux multiples facettes n’a pas été toujours compris. Où est passé tout çà en moins d’un demi-siècle ? Ce regard pour positionner le Sénégal dans la sphère des grands pays de la planète semble avoir cédé le pays à une forme de minimalisme issue de la faible qualité de l’éducation donnée aux enfants et aux jeunes ; mais encore à la mauvaise qualité des rapports sociétaux tels qu’ils sont perçus par les moins jeunes, avec leurs nouveaux outils de contacts avec le monde ; le téléphone et l’Internet pour ne pas les nommer. Enterrant les rêves de gens comme Senghor, mais aussi ceux de son ami devenu son ennemi entretemps, après mai 1968, nommons encore Pierre Fougeyrollas (4).

N’est-il pas d’ailleurs exagéré dans ce contexte de parler d’art simplement fut-il nouveau ou ancien ou encore premier, dans une ville sans âme culturelle quand on parle infrastructures ou simplement d’humanisme au sens noble du terme ? Ecrire sur l’art nouveau dans l’architecture, dans la sculpture, le design et les inventions dans un pays comme le Sénégal, quel intérêt pourrait y avoir l’Etat, toutes les écoles et le grand nombre ? Le temps du rêve semble fini et les phénomènes qui soutendent cette affirmation existent pourtant et on les trouve dans la manière dont fonctionne la société aujourd’hui.

Au moment où les grandes écoles d’artistes ( en dehors de l’architecture dans une moindre mesure) n’attirent plus les enfants sur ces questions, les jeunes semblent plus fascinés par les études financières, la banque surtout et se détournent de plus en plus de ces grands métiers qui touchent le grand art comme le cinéma, le théâtre, l’artisanat etc. Or pendant ce temps, dans d’autres sphères plus avancées qu’ici, ces arts ont pris une nouvelle dimension et sont devenus parmi les pratiques les plus novateurs en matière de création et d’amélioration de la qualité des regards sur la vie et la cité. Le monde a changé. Même l’architecture, art auquel des noms célèbres comme Cheikh Ngom (5) et Pierre Goudiaby ont permis d’occuper une place dans le cœur des jeunes des années 1970, peine à trouver des espaces de formation qui lui sont propres.

Ville ou village des arts, Dakar n’a plus beaucoup d’attraits charmants quand on parle de culture et de cinéma. En dormance, après la mort du film de rue et des salles, celle du théâtre a suivi. Même après la naissance du Grand Théâtre qui n’a de théâtre que son nom, le sixième art est en quête d’espace dans la ville. Inauguré le vendredi 15 avril 2011, le Grand Théâtre national du Sénégal entre pourtant dans la lignée du projet des 7 merveilles du parc culturel du président Abdoulaye Wade. Mais, il n’a pas encore permis de réveiller le Théâtre dans la cité. Pour regarder le scénario « Poot mi » de la troupe de Sorano, il faudra attendre… Surtout au moment où le Sénégal, est revenu du Fespaco de Ouagadougou avec le Grand Prix du Jury du Festival, pour le film « Félicité », réalisé par Alain Gomis, sorti en 2017. Cette coproduction franco-belgo-germano-sénégalo-libanaise est le produit d’un métissage. Le film a été présenté en première mondiale en sélection officielle à la Berlinale 2017 où il avait déjà remporté le Grand prix du jury.

Pour celui qui veut voir ce film ailleurs qu’à la télévision, il faudra simplement expliquer que le synopsis du film est résumé à travers ces images : Entourée de musiciens, Félicité chante le soir dans un bar de Kinshasa. Cette femme libre et fière voit soudain sa vie basculer lorsqu’elle apprend que son fils Samo a eu un accident de moto. L’adolescent de 14 ans doit être rapidement opéré sinon il risque d’être amputé d’une jambe. Mais pour que le chirurgien consente à l’opérer, il faut que Félicité réunisse une somme d’argent conséquente. Commence alors pour la jeune femme une course contre la montre dans les rues pauvres de ville afin de réunir la somme. Mais, entre les arnaqueurs, les mauvais payeurs et la désapprobation familiale, la quête de Félicité s’annonce très difficile. Le reste est à voir à l’écran, un jour peut être dans une salle rénovée de la ville.

LA LIBRAIRIE EST DANS LA RUE…PAR TERRE

L’autre mauvaise nouvelle pendant que le Pôle de Diamniadio polarise l’attention du régime de Macky Sall, c’est la mort des librairies et des livres. Et pourtant, quand à l’intérieur de la Librairie des « Quatre vents » vous tombez sur une personne qui s’appelle Dominique Ndecky, restaurateur, responsable de la formation des futurs pâtissiers de l’Ecole d’Hôtellerie de Dakar, qui cherche un ouvrage, vous vous dites qu’il y a encore des lecteurs et des amoureux du livre dans la ville. Mais le livre coûte cher, éditer un ouvrage encore plus…

Les librairies parterre ; désormais, un paradis pour les férus de lecture. Ils ne sont pas nombreux, mais combien sont-ils tous les jours à fouiner du coté de la place El Malick, l’ancienne gare de bus du marché Sandaga, mais encore sur toutes ces petites rues de la cité où quelques kiosques de fortune ont élu domicile pour aller chercher des livres devenus rares s’ils ne sont pas épuisés, chez ce libraire.

On ne lit plus chez les jeunes ou très peu malgré le miracle de l’Ipad ; et cela se sent dans le nombre de fréquentations des librairies. « Même les livres inscrits au programme scolaire, fait remarquer ce professeur, ne sont pas lus entièrement par les élèves et même les étudiants d’aujourd’hui. »
Grave pour une ville qui veut redevenir un centre du monde, une cité du tourisme, du livre, du théâtre et du cinéma, Dakar est comme dans un mur…

VILLE D’AFRIQUE ET DU MONDE : L’ancienne métropole est presque aux antipodes

Dakar se renouvelle et veut retrouver sa place d’antan sur l’échiquier urbain en Afrique, mais les retards ne sont-ils pas trop grands quand on la compare à des places économiques, culturelles et touristiques comme Casablanca ou Marrakech rien que pour le Maroc ? Parler d’art nouveau, de littérature, de livre tout court dans un pays où la lecture et la fréquentation des salles de lecture est devenue un fait d’exception ; n’est-ce pas rêver d’un Dakar qui n’existe plus que dans l’imaginaire des gens ? Une ville, pour les artistes, ce sont avant tout, des places comme Vendôme dans le vieux Paris. La place Vendôme, située dans le 1?? arrondissement de Paris, se trouve au nord du jardin des Tuileries, au sud de l’Opéra Garnier et à l’est de l’église de la Madeleine.

Rien que des monuments d’un certain âge. Voilà aussi pour l’image. Emblème du luxe à travers le monde, la place Vendôme compte de nombreux bijoutiers et joaillers, des hôtels de luxe et des boutiques de haute couture. Cette place n’a pourtant pas toujours été calme : haut lieu lors de la Révolution, elle fut une place politisée pendant des décennies. Ce monument est aujourd’hui en partie classé au patrimoine de l’Unesco grâce à certaines façades. En son centre, un obélisque composée de cannons ennemis fondus (sur demande de Napoléon) se tient fièrement.

Alors quand on parle dans ce contexte d’art nouveau, d’espace de lecture, de cinéma ou de théâtre, cela se lit aussi avec le bâti dans la cité. Jugez-en vous-mêmes. Il existe une importante littérature autour du concept d’art nouveau. L’expression consacre d’ailleurs, un phénomène exprimé sous un grand nombre d’appellations, et, parfois, de sobriquets : en Autriche et en Allemagne, le Jugendstil (« style des jeunes ») succède au Neustil (« style nouveau »), tandis que le Sezessionstil (« style de la Sécession ») reste cantonné à Vienne. Les États-Unis connaissent le style Tiffany, la Grande-Bretagne le mouvement Arts and Crafts, les Pays-Bas le Nieuwe Kunst et la Belgique le mouvement ou ligne belge et le style Horta. En Espagne, on parle de Arte joven ou de modernismo, en Italie de Stile floreale ou de Stile Liberty, de style 1900, nouille, métro, voire rastaquouère en France.

Au cœur de la cité, en face de l’Assemblée nationale, le Musée de l’Ifan, est nul doute l’endroit le moins connu des Dakarois. Rares sont ceux qui s’y hasardent ou qui ont eu la chance de franchir la porte. En dehors des universitaires, ou encore les fonctionnaires qui l’occupent, quel sénégalais connaît vraiment le musée de l’Ifan ou le nom de son Directeur actuel ? Le mythe de places a disparu de la ville. Et quand on parle de musée, la ville, les villes sénégalaises n’ont pas de projets pour ce genre de monument. Malgré le projet de construction d’une Grande bibliothèque nationale, le pays tout entier manque de perspectives dans ces domaines. Le président de la République, Macky Sall et son équipe ne démentiront pas même s’ils veulent mettre en route, le vieux projet du président Senghor d’édification du Mémorial Gorée-Almadies (6).

Un Mémorial ! Que d’eau a coulé sous les ponts depuis le premier jour que ce mot est sorti de la bouche d’un Président de la République. Senghor, Abdou Diouf, Wade, aujourd’hui c’est Macky Sall et cie qui s’y mettent. Pour Pierre Goudiaby interviewé dans Sud Week-end en décembre 1996, « C’est par le mémorial que devait se dessiner le futur plan d’urbanisme de Dakar… » Dans le Dakar virtuel de 2000 dont on avait rêvé à l’époque dans le numéro du même Sud Quotidien, d’un autre mois de décembre, cette fois en 1998, la ballade des enfants qui se promenaient dans la ville imaginaire de ce début du siècle, contemplant ce mémorial debout sur le bord de mer n’était pas qu’un rêve. On se projetait… Le temps est passé, mais le Mémorial attend encore…

LES GALERIES D’ART N’ONT PLUS QUE LA RUE

Il s’appelle Laye. Les cheveux en dreadlocks, le jeune garçon vend des masques divers accrochés sur un mur devant le grand portail des Niayes Sarraut, qui pris place pour le jardinage, la place des anciens magasins de Buhan et Tesseirre. Dakar a changé de cap ; la preuve. Sur le mur de cette vieille bâtisse, le long des murs, ce jeune garçon accroche de à sa manière bien à lui, mais très artistique ses œuvres sur le mur qu’il a transformé en véritable œuvre d’art ambulante. Sans local où mettre son petit millier de pièce Laye est pourtant un symbole pour ses amis « artistes ». Il montre la voie. Comme ce tailleur de pierres qui occupe la corniche du coté de l’Université de Dakar, lui n’a pas les moyens de nicher tous ces biens dans un abri sûr. Il trône avec sa « petite richesse » sur ce pan de mur qu’il essaie de recouvrir le soir avec une petite bâche. Où est la défense de la culture dans cette ambiance ? Lui dit se débrouiller avec ses maigres moyens et ses ventes quand une personne intéressée, un touriste rare passe lui prendre un buste sorti d’on ne sait où souvent ; ou une poterie. Ainsi, va la vie.

MONTREAL, VILLE DU LIVRE ET DE BIBLIOTHEQUES : Une porte d’ouverture culturelle pour Dakar

Un simple exemple d’ouverture sur le monde et le livre, allons au Canada dans la belle province du Québec. Un autre symbole attire l’attention de celui qui est curieux et qui visite cette partie de l’Amérique du nord. Organisme du secteur para-public québécois, la Grande Bibliothèque du Québec (Gbq) a été Institué en 1998 pour donner à tous un accès inégalé au patrimoine documentaire passé et actuel du Québec. Il a été intégré à la Bibliothèque nationale du Québec (Bnq) en 2002, aujourd’hui, c’est sous la forme d’une Bibliothèque et Archives nationales du Québec (Banq) qu’elle fonctionne. Pour ceux qui connaissent un peu cette ville, la Grande Bibliothèque, a ouvert ses portes en 2005 sur le boulevard de Maisonneuve Est, à Montréal.

Pour information, La mission de la Gbq, dans cette ville qui accorde une importance sa réserve à la littérature et au livre, consistait à offrir un accès démocratique à la culture et au savoir et d’agir, à cet égard, comme catalyseur auprès des institutions documentaires québécoises, contribuant ainsi à l’épanouissement des citoyens. La loi qui a institué cette Grande bibliothèque du Québec prévoyait ainsi la poursuite des objectifs suivants : valoriser la lecture et l’enrichissement des connaissances, promouvoir l’édition québécoise, faciliter l’autoformation continue, favoriser l’intégration des nouveaux arrivants, renforcer la coopération et les échanges entre les bibliothèques et stimuler la participation québécoise au développement de la bibliothèque virtuelle.

Espace de rencontres, cet espace du livre n’est pas seulement qu’une grande bibliothèque, c’est aussi une porte ouverte sur le monde et tout ce qui se fait de mieux dans le monde. L’histoire, la géographie, la peinture, la philosophie, l’écriture dans ses variétés, le monde du vert et de l’agriculture depuis le micro jardinage jusqu’aux technologies vertes ; mais encore toutes les sciences sociales comme l’économie, l’anthropologie culturelle, la sociologie, l’économie. La Gbq ce sont encore toutes les sciences dures et techniques, les nouvelles technologies et les mathématiques ; le numérique aussi et l’industrie du service et ce n’est pas fini. Vous pouvez y passer toute une journée sans vous lasser de ce que vous voyez.

MERVEILLES DES ARTS VISUELS : Un monde nouveau : la cité

La ville est aujourd’hui l’espace qui canalise en sein toutes les formes d’art. de l’architecture aux arts de la scène, tout y est. Commençons d’abord par les ouvrages d’art et dire, simplement avec l’éclairage du chercheur, que « L’artisan d’art et l’artiste décorateur sont valorisés par le maître de l’ouvrage qui veille à intégrer et à mettre en valeur, en étroite symbiose, leur savoir-faire, leur ingéniosité technique et leur imagination créatrice. »

En matière de travail du fer, la trouvaille n’a pas fini d’étonner le monde tant en matière de génie civil que de confection. La ferronnerie, on l’appelle. Quelques lycées comme l’ancienne Ensut y travaillent depuis des décennies. Mais, qu’est ce que le fer apporte au bâti ? L’expert répond ainsi en citant les différents matériaux qu’on peut y utiliser à savoir Fer, acier, bronze et fonte : le métal est travaillé en ruban, en torsade, en volute ou en rinceau. La fonte à l’avantage de pouvoir se mouler. Elle a été utilisée pour les rambardes de fenêtre et de balcons et surtout par Hector Guimard pour la réalisation de ses entrées de stations de métro avec des motifs très personnels.
Aujourd’hui, il est simplement question non pas d’abandonner la pierre et le béton, mais d’affiner davantage le regard sur la cité en lui adjoignant, tous ces matériaux et ces mondes complémentaire des arts et de la culture qui lui permettent de faire encore plus fin et moins brut qu’avant.

Pour reconnaitre l’Art ou les arts nouveaux, toutes les lignes se croisent avec une seule obsession, faire encore plus beau et plus visible. Bienvenue dans le monde des lignes courbes, avec la quasi-suppression de la ligne droite. Nouvelle donne de ce regard de l’urbain son monde, l’importance grandissante de la lumière naturelle et des baies faites en vitrage ou le verre pour faire simple.

A Dakar, comme un peu partout dans les stations touristiques sénégalaises avec les résidences, beaucoup de façades comme les ouvertures sont faites de verre. Autre grande inspiration du moment dans les tracés d’architecture, le monde végétal et animal et ses multiples facettes. S’y ajoutent les diverses influences venues des arts venus d’autres pays à l’histoire ancienne comme le Japon, l’Egypte et la forte utilisation d’éléments colorés avec une diversité de matériaux utilisés en pierre en bois, feuille de papier, en peaux, tissus etc. Tout est dans le détail dans cet art nouveau du bâti.

Au final, le but de ce dossier est comme un regard sur les arts, mais surtout sur la ville et la vie de tous les jours tout court. Or, en conclusion, il faut simplement faire remarquer en partant de tout ce qui a été dit dans la première partie de cet exercice. A savoir qu’en rompant délibérément avec un art qui ne disposait plus que de formules épuisées, l’Art nouveau a préparé la révolution architecturale des « années 1920 », mais encore celle années dites plus ouvertes sur la modernité. Et en revoyant toute la lecture qu’on pourrait faire sur la cité depuis les plus grandes jusqu’aux nouvelles villes, on peut retenir que s’il ne la réalisa pas lui-même, c’est parce que l’emploi du béton armé devait remettre tout en question. Aujourd’hui cette manière de bâtir la cité semble avoir fait son temps.

Adapter le matériau à la modernité du temps (utilisation du béton) ou révéler celui qu’on négligeait (adoption de la brique, économique et décorative) est devenu une exigence essentielle au fil des ans, soulignent tous les spécialistes qui se penchent tous les jours sur le devenir de la cité. Si l’on ne retenait que l’influence de Morris ou de Van de Velde, peintres venus à l’architecture, celle-ci pourrait paraître sous la dépendance des arts plastiques chers à un homme de la cité comme l’artiste plasticien, Viyé Diba (7). Lui qui disait que « C’est du désordre de la ville et de la superposition des images et des activités humaines que je nourris mon inspiration. »

FOCUS SUR…Un avenir à réinventer Du feeling, des formes, des couleurs, un style…

Dans le Dakar d’aujourd’hui et de demain sûrement, des choses bougent malgré les manques soulevées un peu plus haut dans cet effort de construction. On parle encore d’art sans le théâtre, le cinéma et les bibliothèques. La ville essaie ainsi de se réinventer ailleurs avec ses moyens.

Et l’on part de cet art nouveau et décoratif, objet de ce dossier. L’Art nouveau a pour ambition de fonder un style qui ne doive rien au passé et qui puisse imprégner tous les niveaux de l’activité quotidienne, de l’architecture à la mode vestimentaire, dans la rue comme dans les intérieurs ; choses qui existent pourtant dans la cité. Le but final en serait l’œuvre totale (appelée Gesamtkunstwerk par les Allemands), où se résumeraient les aspirations à la modernité d’une société en pleine transformation.

Mais, au lieu de donner le pas à l’ingénieur – ou au designer – sur l’artiste, comme le fera le 20 ème siècle, l’Art nouveau pense que l’artiste seul est en mesure de donner au monde moderne un visage harmonieux. En 1895, le collectionneur et marchand français d’origine allemande Samuel Bing ouvre à Paris un magasin d’objets d’art et le baptise « L’Art nouveau », reprenant ainsi l’expression créée par la revue belge l’Art moderne, fondée en 1881.

Œuvre d’art à part entière, la maison, comme les édifices sont devenus aussi des espaces de création qui combine la magie de tous les arts de la plomberie, à la conception des espaces intérieurs de la concession. Dans la rue, dans la cité simplement, comme sur les avenues des quartiers urbains qui la composent, tout change en vitesse grand V. La vie a changé comme la ville grâce au génie humain, (on va dire des artistes, des architectes et des urbanistes comme des géographes, des sociologues, autres anthropologues, des ethnologues et des historiens qui n’arrêtent pas de la lire chaque jour différemment en demandant plus de cohérence, plus d’harmonie). Plus de vie pour dire.

Ce dossier a été dédié à Joe Ouakam, homme des arts. Un introverti, homme de son temps dans la cité. Artiste, homme de cinéma et de musique. Un grand témoin qui nous a quitté ce 25 avril 2017 à Dakar.

Notes
1- Georges Ballandier, « Afrique ambiguë » Paris, éd. Presses Pocke, 1967 ; à lire aussi, Georges Ballandier, « Sociologie des Brazzavilles noires », paru aux Presses de sciencesp Pô (Pfnsp), 1985.
Né le 21 décembre 1920 à Aillevillers-et-Lyaumont (Haute-Saône) est mort à Paris le 5 octobre 2016, Georges Balandier est un ethnologue et sociologue français. Il a été professeur émérite à la Sorbonne, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, fondateur du Centre d’études africaines et des Cahiers d’études africaines.

2- Fougeyrollas restera comme une des figures les plus marquantes de la vie intellectuelle et politique de la seconde moitié du XXème siècle. Cet esprit de résistance, à l’occasion d’un discours insultant jeté à la face de Georges Pompidou, provoqua la rupture entre Senghor et Fougeyrollas. Cet esprit de résistance, l’esprit de résistance à l’occasion d’un discours insultant jeté à la face de Georges Pompidou, provoqua la rupture entre Senghor et Fougeyrollas ; Pierre Fougeyrollas a été professeur à l’Université de Dakar dans les années 1960. Il a dirigé pendant trois ans l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN) de 1968-1971 ;

3- Né en 1928 à Saint-Louis, dans le nord du Sénégal, Iba Ndiaye s’installe en France en 1948, où il suit d’abord des études d’architecture, avant de revenir au Sénégal en 1959, un an avant l’indépendance du pays. Il a enseigné à l’Ecole des Arts de Dakar, dont le but est d’accompagner la formation des artistes sénégalais, jusqu’en 1966. Inconnu des jeunes sénégalais, cet ancien élève du lycée Faidherbe de Saint-Louis, a été l’un des grands maîtres de l’art moderne sénégalais, et même africain. Iba Ndiaye aura influencé plusieurs générations d’artistes par sa peinture, et son enseignement.

4- Les attitudes à l’égard des objets d’art traditionnels en Afrique,
Louis Vincent Thomas et Pierre Fougeyrollas ; Paris, 1967 rollas ; Paris, 1966

5- Architecte et ingénieur, Cheikh Ngom, né à Ziguinchor (Casamance) a été l’un des premiers architectes sénégalais à installer un cabinet d’architecture ici à Dakar. Le Sénégal et l’Afrique de l’ouest lui doivent à ce titre, la Tour de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest ;

6- La volonté d’édifier un espace du souvenir à Gorée répondait à un vœu ardent exprimé à différentes reprises par les intellectuels et les artistes noirs des différentes diasporas. Dès 1975, le Président Léopold Sédar Senghor avait émis l’idée « d’édifier un monument en hommage à l’Afrique »

7- Ousmane Sow Huchard, Viyé Diba : plasticien de l’environnement, Sépia, Saint-Maur ; NEAS, Dakar, 1994, ou encore Monique Hirschhorn et Moustapha Tamba, « Les objets témoins de Viyé Diba ». Viyé Diba est né le 31 décembre 1954 à Karantaba (Casamance)1 est un peintre sénégalais contemporain. Il fait partie de la deuxième génération 2 de l’« École de Dakar.

Source:news.adakar.com




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