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Ousmane MBaye : le destin d’un frigoriste devenu designer

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En abandonnant les études très tôt, le jeune sénégalais Ousmane MBaye ignorait qu’il allait devenir un célèbre artiste dont les œuvres seront exposées en Afrique et en occident. Après avoir passé près de deux décennies  à travailler comme frigoriste, il découvre avec le soutien de sa mère sa véritable passion. Aujourd’hui, le Sénégal fabrique des meubles avec des métaux récupérés qu’il  récemment  exposés à la Biennale de Dakar. Il prépare « Ousmane MBaye, dix ans dits en design », une nouvelle exposition qui aura lieu au le centre culturel de la ville de Paris. Dans un entretien accordé à RFI, il revient sur son parcours atypique.

Sur votre CV, on lit que vous avez été d’abord frigoriste ? Comment êtes-vous passé de la réparation et de l’entretien des frigos au design ?

Le plus naturellement possible. En quittant l’école très tôt, j’ai fait un métier de frigoriste pendant 17 ans et donc j’aimais bricoler et faire des choses. Tout doucement, j’ai fabriqué des choses sans savoir que c’était du design, mais je m’amusais à faire deux ou trois trucs.

Alors que vous travaillez dans l’entreprise de votre père frigoriste ?

En tant que frigoriste. J’ai fait des luminaires, des bougeoirs comme ça pour m’amuser. Doucement, avec le temps, il y a une amie qui a acheté une maison à Gorée et qui m’a dit, « fais-moi des pièces pour ma maison à Gorée. Voici ce que je veux ». J’ai fabriqué des pièces pour elle. Ma maman m’a demandé, « mais pourquoi tu ne crées pas des pièces pour exposer ? »  J’ai dit, « je ne suis pas un artiste ». Elle m’a dit, « réfléchis, tu travailles bien, tu peux faire des choses ». L’expo s’est faite et cela a eu un très grand succès. Ça a commencé comme ça.

On a face à vous vos fauteuils créés cette année pour la Biennale de Dakar : jaunes, composés de morceaux de fûts de pétrole. On voit même encore le coquillage d’une célèbre marque de pétrole. Vos pièces, vous les fabriquez en métal tiré des fûts de pétrole, qui donne de la couleur à vos meubles ?

Mes premières pièces, j’ai travaillé avec d’anciennes conduites d’eau et des fûts de pétrole. C’était plus facile d’accès pour moi. C’est ce que j’ai trouvé dans mon environnement proche. Et je me suis rendu compte que toute matière est noble et tout dépend ce que l’on en fait. Mais avec cette pièce-là, il n’y a pas de récup. Je ne travaille pas qu’avec la récup. La récup, c’est 15 à 30 pour cent de ma matière brute. C’est tout ce qui est colorié. Le reste, c’est du métal qu’on achète tout neuf et que je travaille.

Comment travaillez-vous ? Vous dites que vous ne savez pas dessiner ?

Je ne sais pas dessiner, mais je conçois ma pièce à l’intérieur de ma tête.

En fait vous ne dessinez pas le meuble, vous le pensez ?

Toutes les proportions sont déjà faites dans ma tête. Il faut juste les reproduire.

Ensuite, vous allez à l’atelier. Vous travaillez avec des ouvriers, mais vous n’avez pas de dessins à leur présenter ?

Ce sont des ferronniers que j’ai embauchés et que je forme dans ce métier. Ils savent comment je travaille. Je fabrique avec eux le prototype.

Vous fabriquez le prototype et ensuite, ils le reproduisent ?

Et quand on commence à fabriquer une pièce, ils ne savent pas ce que ça va devenir.

Vous travaillez toujours au même endroit depuis que vous êtes frigoriste ?

Oui, on vend toujours un peu de frigos.

Il y a encore quelques vieux frigos qui traînent ?

Oui, et de temps en temps, il y a mon frère qui amène des frigos pour les réparer.

Comment votre travail a-t-il été perçu au début ? Cette fabrication de meubles à partir d’éléments de récupération ?

Beaucoup de gens pensaient que c’était destiné à tout ce qui était touristique.

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On pensait que c’était pour les Blancs ?

Au début, je pensais que c’était une question de coût. Non, ce n’est pas une question de coût. Pour pouvoir toucher la clientèle africaine, depuis deux ans, je travaille plus dans le haut de gamme, plus de finitions, et plus dans les matières beaucoup plus élaborées. Et j’ai commencé à toucher la clientèle africaine.

Ça reste quand même assez cher pour le marché africain ?

Non, ce n’est pas cher.

Un fauteuil à 2 000 euros ?

Quand tu vois les boutiques comme Orca à Dakar ou d’autres boutiques de mobilier, ce sont les mêmes prix. Et quand tu vois la qualité de travail et le temps mis sur les pièces… C’est du gros travail.

Ici au Centquatre, c’est donc une rétrospective sur vos 10 ans de design. Cela avait commencé avec des chaises et avec ces tabourets que vous avez baptisés Patrimoine. Pourquoi ?

Quand je dis « patrimoine », pour moi c’est l’assise.

Le  « patrimoine », ce sont les fesses, c’est ça ?

Bien entendu. Et je me suis rendu compte qu’il y a beaucoup de gens qui étaient mal desservis. Dès qu’une personne est un peu forte, l’assise devient compliquée sous certaines personnes. Donc j’ai retravaillé cela pour que tout le monde soit bien et se sente bien sur une assise.

C’est un tabouret qui fait en réalité un creux ?

Et qui permet à toute personne de toute taille d’être à l’aise. Petites fesses comme grosses fesses. Ça fait partie des pièces que je vends le plus. C’est mon best-seller, on va dire.

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