Une nouvelle résurgence peut se produire à tout moment. Ce n’est pas en contraignant des Togolais à l’exil et en empêchant d’autres de revenir au Togo que l’on résoudra la crise togolaise. Ce n’est pas en trouvant des prétextes fallacieux pour empêcher des Togolais à prendre part à des élections que l’on résoudra la crise togolaise… Lisez plutôt l’intégralité de la déclaration linéaire du Parti des Togolais de Nathaniel Olympio.
Déclaration liminaire
Comment atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ou résoudre le problème du foncier si les Togolais ne disposent pas de carte nationale d’identité ?
Le Parti des Togolais est particulièrement préoccupé par la posture du gouvernement qui se démène pour faire croire que la situation sociopolitique s’est normalisée et que la stabilité règne par la résolution de la crise avec les élections législatives de décembre 2018 et les élections locales en cours. Certes, les manifestations sont interdites de facto et cela produit un calme précaire et non inclusif, une stabilité de résignation qui n’est pas construite par une contribution effective des citoyens.
Les causes des frustrations sociales et des frustrations politiques qui ont sous-tendu les grandes manifestations organisées par l’opposition depuis août 2017, demeurent intactes. Le Parti des Togolais rappelle et insiste sur le fait que la résolution de la crise profonde qui mine notre pays passe nécessairement par la valorisation du statut de citoyen, à commencer par la reconnaissance de ce statut par l’Etat et par l’apport de solutions concrètes aux différentes frustrations. C’est la condition sine qua none pour donner une chance de prospérité à tout contrat social proposé par l’Etat.
Valorisation du statut de citoyen
Le sentiment d’appartenance de chaque individu à une Nation détermine son engagement à entrer dans un projet collectif, un projet national. Tant qu’un individu n’est pas reconnu par l’Etat comme étant citoyen de celui-ci, il lui sera toujours difficile d’être un acteur qui contribue avec engagement à la construction de la Nation ou à tout projet d’intérêt national. Cette reconnaissance de la citoyenneté par l’Etat passe par la délivrance d’une Carte Nationale d’Identité. Dans certains pays, l’effort de l’Etat consiste à délivrer gratuitement la première carte nationale d’identité. C’est une démarche qui montre que l’Etat se porte garant de la citoyenneté.
Au Togo, les publications de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) indiquent que plus de 75% des Togolais n’ont pas d’acte de naissance. Les Togolais qui ne disposent pas de carte nationale d’identité sont estimés à plus 85% de la population. Cela aussi est une singularité du Togo dans la sous-région. Comme pour confirmer ces chiffres, l’Institut Nationale de la Statistique et des Etudes Economiques et Démographiques du Togo (INSEED) vient de publier une étude qui souligne que 85,5% des entreprises opèrent dans l’informel.
Ces chiffres expliquent en partie l’échec de tous les plans de développement et d’épanouissement social lancés par les gouvernements successifs depuis de longues années. Le dernier en date, le PND, n’échappera pas au même sort dans les conditions similaires. Plusieurs pays de la sous-région ont connu la même situation d’une grande majorité de population ne disposant pas d’acte de naissance. Ils ont apporté des réponses efficaces en organisant des audiences foraines. C’est le cas des pays comme le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Sénégal. Avec une population de 22 millions d’habitants au moment de l’organisation des audiences foraines, tous les ivoiriens ont été pris en compte en moins de quatre (4) mois.
Le Parti des Togolais lance de nouveau un appel pressant au gouvernement togolais, afin qu’il prenne les dispositions utiles pour délivrer un acte de naissance, un certificat de nationalité et une carte nationale d’identité aux Togolais dans un bref délai. Par les audiences foraines on peut y arriver dans un délai raisonnable. C’est un devoir pour l’Etat togolais qui ne peut pas continuer de s’y dérober. Cette préoccupation est exprimée par les Togolais depuis plusieurs années déjà.
Les 22 engagements pris par l’Etat togolais en 2004 auprès de l’Union Européenne comportaient aussi ce point. Un autre rapport de l’Union Européenne l’a rappelé en 2007. L’Organisation Internationale de la Francophonie l’a encore souligné en 2015. Le Gouvernement ne peut donc pas prétendre ignorer ce grand problème. Tant que les Togolais seront en grande majorité incapables de produire une carte nationale d’identité, donc apatrides et prisonniers dans leur propre pays car privés de liberté de voyager légalement, on ne peut attendre d’eux qu’ils construisent la stabilité et encore moins d’être acteurs du succès d’un plan de développement, fut-il le PND lancé à grand renfort de publicité sans avoir fait le bilan des plans précédents.
Comment atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) auxquels le Togo s’est engagé, lorsque les Togolais ne disposent pas d’acte de naissance et sont donc exclus de toute l’économie moderne ? Comment le Gouvernement compte-t-il résoudre le problème du foncier si les Togolais n’ont pas de carte nationale d’identité ? Dans ces conditions, les frustrations sociopolitiques ne peuvent que demeurer intactes.
De vraies solutions aux frustrations sociopolitiques
Par la brutalité sur les manifestants qui ramène un calme précaire, par une révision constitutionnelle non consensuelle et approximative, par l’organisation des élections législatives largement boudées par les électeurs et des élections locales qui n’apportent aucune solution sérieuse, le gouvernement croit pouvoir vendre sur papier glacé aux médias et aux partenaires une solution à la profonde crise.
Le peuple togolais le sait et le gouvernement le sait. Tous les ingrédients de la crise sont encore solidement en place. Une nouvelle résurgence peut se produire à tout moment. Doit-on attendre les bras croisés et laisser le pire arriver ? Ce n’est pas en contraignant des Togolais à l’exil et en empêchant d’autres de revenir au Togo que l’on résoudra la crise togolaise. Ce n’est pas en trouvant des prétextes fallacieux pour empêcher des Togolais à prendre part à des élections que l’on résoudra la crise togolaise. Et ce n’est pas en maintenant arbitrairement des Togolais en prison que l’on résoudra la crise togolaise. Quelle est, en effet, cette démocratie qui permet plus de deux mois de garde-à-vue d’un responsable de parti politique interpellé dans le cadre de l’organisation d’une manifestation publique pacifique ?
Le Parti des Togolais demande la libération des responsables politiques et des militants de l’opposition détenus dans le cadre des manifestations pacifiques publiques, de même que des défenseurs des droits de l’homme interpellés et détenus dans le cadre de l’exercice de leurs droits. Il y en a aujourd’hui plus d’une quarantaine, notamment messieurs Ouro-Djikpa Tchatikpi, Nourridine Gueffé, Kéziré Azizou respectivement conseiller, trésorier, secrétaire permanent, tous les trois (3) du PNP et Foly Satchivi, porte-parole du mouvement « En Aucun Cas ».
Le Parti des Togolais interpelle le gouvernement sur l’évolution des enquêtes supposées en cours au sujet des personnes tuées par balles lors des manifestations pacifiques publiques. C’est notamment le cas des élèves Rachad Agrignan tué le 20 septembre 2017 à Bafilo, Abdoulaye yacoubou tué le 20 septembre 2017 à Mango et Joseph Zoumekey tué le 18 octobre 2017 à Bè Kpota, de même que le jeune apprenti mécanicien Idrissou Moufidou tué le 8 décembre 2018 à Agoè Zongo. Une liste qui vient s’ajouter à celle de Douti Sinalengue et Anselme Sinandare tués à Dapaong le 15 avril 2013. Pour ce dernier cas, cela fait déjà six (6) longues années que ces enquêtes sont ouvertes. Depuis lors, aucune information n’a été donnée par le Gouvernement sur l’évolution. Les familles attendent toujours pour connaitre la vérité. Le disparition de ces jeunes continue de nous déchirer le cœur et ne demeurera pas vain.
Le Parti des Togolais appelle le Gouvernement à engager sans délai de vraies solutions aux frustrations sociopolitiques des Togolais. Le Parti des Togolais appelle en conséquence le peuple togolais à rester vigilant. L’intermède des élections locales ne doit pas nous détourner de l’essentiel. Le Parti des Togolais félicite les Togolais pour leur courage et leur détermination et les invite à demeurer actifs sur tous les sujets de préoccupation.
Ensemble transformons le Togo.
Il est temps.
GAMESUJe vous remercie