Tel un effet de boule de neige, la nouvelle est tombée le 13 avril dernier. Dans un communiqué du FMI, la directrice Générale du fonds, Kristalina Georgieva (photo) avait annoncé que 25 pays africains dont le Bénin allaient bénéficier d’un allègement immédiat du service de leur dette, en guise d’appui face à la pandémie au Coronavirus. Pour l’institution de Bretton Woods, il s’agit ainsi pour ces nations concernées, d’orienter leurs ressources financières ‘vers les secours médicaux d’urgence et autres secours vitaux’. Mais la prudence est de mise, à en croire un économiste.
Dans la foulée, le Président français Emmanuel Macron s’est également jeté dans la danse pour appeler à l’annulation d’une partie de la dette des pays dans le besoin, à la suite des requêtes du dirigeant Sénégalais Macky Sall.
Mais face à l’euphorie que continue de susciter cette ‘bonne nouvelle’ sur le continent, le ministre béninois de l’Économie et des Finances, Romuald Wadagni, attire l’attention sur les conséquences désastreuses qui pourraient bien en découler.
Certes, l’allègement du poids de la tête pour les pays africains semble se présenter comme une bouffée d’oxygène pour les économies africaines, lesquelles restent plombées par la crise liée au covid-19.
Mais, dans une large mesure, ce qui est brandi sous forme d’aide à l’Afrique s’apparente de plus en plus à un ‘cadeau empoisonné’, à en croire nombre d’économistes africains.
Pour M Wadagni, « ces solutions, malgré la marge budgétaire immédiate qu’elles offrent, ne répondent pas aux enjeux cités plus haut et présentent d’importants inconvénients à court et moyen termes ».
Dans une tribune publiée le 23 avril chez nos confrères de Jeune Afrique, Romuald Wadagni affirme que « les dépenses des États sont appelées à croître rapidement pour contrer la propagation de la pandémie alors même qu’il faut continuer à faire face aux défis du développement ».
Aussi, relève-t-il, « un allègement de la dette ou un moratoire pour le paiement des échéances ternira davantage l’image des États et compromettra leur accès aux financements futurs ».
Par ailleurs, il a tenu à rappeler que « les annulations de dettes opérées dans la décennie passée à la suite de l’initiative PPTE, n’ont pas manqué de laisser de mauvais souvenirs tant au niveau des créanciers privés que des prêteurs bilatéraux publics dont certains ne sont d’ailleurs plus jamais revenus financer nos États, si ce n’est par l’octroi de dons ».
Dans son approche, le ministre béninois de l’Économie et des Finances estime que d’autres pistes doivent être privilégiées.
Ainsi, dans sa tribune, il a juge utile d’approfondir les propositions contenues dans la lettre adressée cette semaine, par le Président Patrice Talon aux dirigeants du FMI et de la Banque mondiale.
Ses propositions se résument comme suit :
1- Aider à la mobilisation urgente de liquidité nouvelle en lieu et place des annulations ou moratoires de dette.
Les besoins urgents exprimés par l’Afrique se chiffrent à 100 milliards de dollars (dont 44 milliards pour le service de la dette). Une nouvelle allocation en Droits de tirages spéciaux du FMI tant débattue devrait être envisagée. Elle permettrait d’apporter une réponse rapide et efficace aux besoins des pays les plus vulnérables tout en préservant la soutenabilité de leur dette. Cette solution n’est pas nouvelle et fut mise en œuvre avec succès lors de la précédente crise financière mondiale de 2008 où 250 milliards de dollars furent débloqués rapidement. Par ailleurs les importantes liquidités mises en œuvre dans plusieurs grands espace économiques ces derniers jours sont édifiantes.
2- Relancer les économies africaines via des financements concessionnels.
Les institutions multilatérales et les banques de développement devraient mettre à profit leur qualité de crédit pour mobiliser individuellement des ressources concessionnelles ou semi- concessionnelles pour le financement des économies africaines, à un moment où leur accès aux financements à taux presque nul est intact, contrairement aux pays africains.