BizME.fr Freelances, plus forts ensemble.
Accueil / Concours IFA / Rharous : Un autre coin enclavé de la région de Tombouctou

Rharous : Un autre coin enclavé de la région de Tombouctou

Partagez ceci :

Marché de Rharous, des femmes exposant leurs articles

9 avril 2017Sécuirté, Société

Historique de la ville

La ville de Rharous fut fondée à l’époque coloniale en 1926 par le commandant français Mourgue. Le nom de cette ville a deux connotations: une  en langue tamasheq, une autre en songhay. Chez les tamasheks le mot tire son origine de « Tagharouss » qui signifie littéralement un espace où l’eau stagne ensuite tarit au fur et à mesure. Quant aux songhay, eux disent Taka Yarassou,  ce qui siginfie les choses sont devenues faciles.                                                            La ville est située dans la commune rurale de Gourma Rharouss. Elle est le chef-lieu de cercle et de commune. Elle comporte cinq principaux quartiers à savoir Boya ,Djoulabougou , Djambourgou, Attbougou et Aldjanabandja. Située sur au bord du fleuve Niger à 160 kilomètres de Tombouctou.

Devanture de la mairie de Rharous

Population et mode de vie

A Rharous la population est composée de plusieurs groupes ethniques. Les tamasheks, Songhays, Arabes, peulhs et bozos. La relation interethnique est à un niveau salutaire dans ladite ville. L’ethnie dominante est le tamasheq. Cependant, la langue principale de communication demeure le songhay. Chaque ethnie vit  d’une activité particulière. « L’élevage étant l’activité principale de la population est confrontée à plusieurs difficultés » a signalé le premier adjoint au Maire Monsieur Younouss Mohamed Ibrahim Maiga que j’ai interviewé dans son bureau. En période de décrue l’entretien du bétail constitue un casse-tête pour ces populations riverains.

Quelques animaux en pâturage au bord du fleuve, Rharous

Les elus locaux dénoncent la mauvaise gestion de la crise par les autorités maliennes. Ils appellent le gouvernement  à plus de responsabilité dans la gestion de la crise.

Le conseiller du maire s’insurge contre cette mauvaise gestion: « Pour résoudre cette crise il faut que le gouvernement malien vienne à la source et concerte les populations locales. Tantôt certaines personnes disent qu’ils viennent d’une rencontre à Bamako, alors qu’ils partent juste pour les perdiems. Il faut que tout cela cesse. J’invite les autorités à concerter les vrais acteurs la crise que vit notre pays« se lamente Alhousseini Ould Omar.

Cependant la population se souvient toujours d’un « Lundi noir » de mars 2016 où 11 militaires maliens ont perdu la vie, assassinés par des hommes armés.

Interview avec le maire de Rharous dans son bureau

Les femmes de Rharous  « Nous voulons la justice mais nous avons peur de nous exprimer  »

La crise sociopolitique a eu un impact négatif sur les femmes de cette localité. Elles ont été victimes de toutes formes de violences :  conjugales, verbales, celle basée sur le genre, mariages forcés entre autres. Certaines femmes m’ont confié leur peur de s’exprimer sur ce dont elles ont été victimes. Chaque souvenir de la crise leur fait  couler des larmes, lorsque elles pensent au malheur qui leur a été infligées. Une femme gardant l’anonymat s’est confiée à moi « fiston, ma boutique a été pillée  pendant que j’étais enceinte, c’est ce qui m’a aveuglée. Aucune justice n’a été rendue  à ce jour. Une femme a été froidement abattue par son mari  pendant l’occupation. Accompagne-nous tout de suite, on va te montrer sa tombe . Son mari étant complice, a réussi à s’exiler au Burkina Faso où il vit toujours sans être inquiété. Son exil a été facilité par les occupants de l’époque dont il fut membre » se désole la dame à peine les larmes aux yeux

Des femmes de l’association « WaymaTaray » avec qui j’ai échangé

ONG Mercy Corps  redonne le sourire aux femmes.

« Merci Mercy Corps »  c’est le message de satisfaction que j’ai pu lire sur tous les visages des femmes de Rharous pendant mon séjour dans cette localité. L’ONG Mercy Corps a débuté son intervention dans cette zone seulement en Janvier 2017. Elle intervient dans le cercle de GoumaRhrouss et de Tombouctou.  Elle a encadré les femmes sur le montage et pilotage des activités génératrices de revenus. Au Total 88 groupements de femmes ont été mis en place dans les deux cercles. Chaque groupement est composé de 25 à 35 femmes. Ils sont repartis entre 11 sites ou villages. Avec un total de plus de 2000 femmes. Chaque membre est doté d’un carnet de membre, d’une cuvette à jetons. L’association dispose egalement d’une caisse de solidarité pour l’ensemble du groupe. L’ONG suit régulièrement les activités de ces femmes bénéficiaires à travers 20 agents relais formés et dotés des moyens nécessaires pour un suivi exemplaire. Les relais à  leur tour sont supervisés par un supérieur hiérarchique qui fait la navette entre les différents groupes présents sur les sites d’intervention.Réunion des femmes bénéficiaires des activités de Mercy CorpsRéunion des femmes bénéficiaires des activités de Mercy Corps

L’éducation à Rharous « 32 écoles risquent d’anticiper la fermeture avant la fin de l’année »

Chez le directeur du centre d’animation pédagogique (DCAP)

Idrissa Maiga est le Directeur du centre d’animation pédagogique  du cercle de Rharous. Je l’ai rencontré dans sa famille. Il m’a accueilli dans une atmosphère amicale. Ce  Dcap a la passion de son pays. Il plaide pour les bonnes causes et le bon fonctionnement de l’école à Rharous. Le cercle compte 15000 élèves pour 83 écoles . 5 écoles n’ont pas ouvert leurs portes après la rentrée scolaire de 2016 dont une qui ne fonctionne pas depuis 2014. Cette fermeture est due à l’insécurité dans les zones respectives, le manque d’infrastructures scolaires et encore la dégradation des écoles après la crise de 2012.                                                                                                                                                              La vie des enseignants également est menacée dans certaines localités . 32 écoles risquent de fermer leur porte avant juin prochain à cause du manque de la cantine scolaire.

» Sans la cantine, les enfants sont hostiles à l’école, et les parents même ne veulent pas les inscrire à l’école.  La cantine reste la condition sine-qua non pour le bon fonctionnement de l’éducation en milieu rural » prévient Idrissa Baba Maiga.

51 écoles fonctionnent normalement dans le cercle grâce à la cantine prise en charge par le Programme Alimentaire Mondial (PAM). Une trentaine d’écoles  fonctionnent avec deux enseignants par école à cause du manque des ressources humaines. Le cercle compte un nombre total de 264 enseignants. Tandis que le besoin qui se fait sentir est de 500  pour un fonctionnement normal. Les parents restent réticents à envoyer leurs enfants à l’école sans la cantine, même si le DCAP continue de sensibiliser les parents à inscrire les enfants à l’école.

Une enseignante et un élève  au tableau

De passage à l’école Fondamentale  Amadou HammaMaiga

Les besoins notifiés par le Dcap se font voir au sein de cette école. Tout d’abord le directeur m’ accueille dans son bureau avec ce ton « l’effectif est pléthorique dans cette école ». Filles 264, Garçons : 225. Dans trois salles de classe, les élèves s’asseyent à terre.Cette école risque d’être emportée par la prochaine saison hivernale. La clôture n’est pas efficace, les salles de classe sont dégradées, les latrines ont besoin d’être réhabilitées. Un réel besoin en infrastructures se fait sentir. L’école disposait de 10 machines à coudre pour l’encadrement des jeunes filles. Mais elles ont toutes été emportées pendant la crise. L’école a un gardien qui fait bien son travail mais depuis 9 ans il n’a pas touché son salaire. C’est pourquoi l’endroit est devenu un dortoir  pour les animaux après les cours.

L’école fondamentale Amadou HammaMaiga

Jeudi, Jour de foire de Rharous

Tous les jeudis ses tient dans la localité une foire hebdomadaire. Ce marché est le plus grand rendez-vous de business pour les habitants. Tous les villageois et riverains convergent vers la cité de Rharous. Tous les moyens sont mis en place par les commerçants pour ne manquer ce rendez-vous hebdomadaire où tous les articles sont exposés au public. Certains viennent vendre leurs articles et profitent également pour se ravitailler.

Jeune tailleur et étalagiste, Boubacar Ibrahim Touré, a vite fait fleurir ses affaires depuis l’après crise. « Maintenant ça va depuis l’après la crise, nous remercions Dieu. Pendant la crise tout est arrêté même un client par mois on n’y gagne pas. »

On peut voir des articles comme des jarres d’eau, des fagots, des habits, des fruits et légumes entre autres. Les femmes aussi bien que les hommes font leur petit commerce. C’est seulement un jeudi qu’on peut rencontrer à Rharous les ressortissants de tous les cercles et communes venant prendre part à cet échange. Certains restent réticents par rapport à la situation sécuritaire dans le Gourma, ils préfèrent se déplacer avec le minimum de marchandise possible.

Marché de Rharous, des femmes exposant leurs articles

Voyager sur Rharous

Se rendre à Rharous nécessite vraiment un courage et une volonté accrus. C’est une zone enclavée sur tous les plans. La ville ne dispose d’aucune infrastructure routière qui la relie à une autre ville. Aucun transport en commun ne pratique le tronçon Rharous – Tombouctou encore moins Rharous – Gao. Pendant mon voyage aller-retour, j’ai eu à voir une mosaïque de drapeaux dans le Gourma.

Cependant Rharous ville est contrôlée par l’armée malienne. Le drapeau national flotte sur tous les édifices publics.Quelques animaux en pâturage au bord du fleuve, Rharous

 

Mohamed Salaha Koyrakoy ( Mali )

Cet article est en lice pour la première édition du Concours « Ils Font l’Afrique IFA ». Laissez un commentaire pour voter pour cet article.




Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Traduction »