Colonel Modibo Koné, c’est désormais lui la courroie de transmission entre les autorités de transition du Mali et les anciens rebelles indépendantistes du Nord. Peut-être le signe d’un possible début de décrispation des tensions entre Bamako et Kidal.
Le 16 juillet dernier, le patron des services de renseignement di Mali était à Kidal, fief des ex-rebelles touaregs. Une visite plutôt surprenante. Le colonel Ismaël Wagué est l’interlocuteur officiel de l’ancienne rébellion du nord du Mali. Mais le ministre de la Réconciliation nationale est une figure clivante, tant au sein des mouvements signataires de l’accord de paix d’Alger qu’au sein de la médiation internationale chargée d’accompagner sa mise en œuvre.
C’est donc un autre colonel putschiste qui a rendu visite aux ex-rebelles lorsque ceux-ci se sont réunis à Kidal, entre le 15 et le 17 juillet : Modibo Koné, le patron de la puissante Sécurité d’État (SE), les redoutés services de renseignement.
Le 16 juillet, celui que certains décrivent comme le cerveau du putsch contre Ibrahim Boubacar Keïta, en 2020, a fait un aller-retour express dans le bastion de la rébellion touarègue. Il s’y est entretenu avec les représentants du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP-PSD, qui regroupe la CMA et la Plateforme).
Un entretien à huis clos – contrairement aux habituels rendez-vous entre les signataires de l’accord d’Alger – dont rien n’a filtré. À peine apprend-on que le chef de la SE a assuré, au nom du président de la transition, Assimi Goïta, que le gouvernement montrerait sous peu « sa bonne foi en matière d’application de l’accord », confie un participant à la réunion. De leur côté, les ex-rebelles disent toujours attendre des « actes concrets » de la part des autorités.
Un gage de bonne volonté ?
Pour autant, aucun engagement concret concernant l’application de l’accord n’a été pris par le colonel Koné. Les mouvements signataires, eux, doivent se réunir de nouveau le 22 juillet à Kidal. L’occasion de discuter de leur retour, ou non, au sein des instances de suivi et de mise en œuvre de l’accord qu’ils avaient quittées en décembre 2022.
Faut-il considérer le choix de Modibo Koné pour porter les messages du gouvernement comme un gage de bonne volonté de la part de Bamako ? Ce n’est en tout cas pas la première fois que le chef de la SE se rend à Kidal. Au début de la transition, alors menée par Bah N’Daw – l’ancien président civil renversé par Assimi Goïta en 2021 –, Modibo Koné s’y était déjà rendu en tant que ministre de la Sécurité et de la protection civile.
En février 2023, il avait aussi rendu une discrète visite aux autorités algériennes, au moment où la médiation internationale (menée par Alger) s’activait pour rouvrir le dialogue entre les parties signataires de l’accord. Un voyage dont la teneur est restée secrète, opéré en marge de celui des ministres de la Réconciliation et des Affaires étrangères, Ismaël Wagué et Abdoulaye Diop. De quoi faire dire à certains que Modibo Koné, considéré comme » les yeux et les oreilles » de la junte, a désormais la main sur ce dossier sensible.
Avec Jeune Afrique